dimanche 7 décembre 2014

L'opinion occidentale a basculé, mais qui en Palestine va en cueillir les fruits?

Depuis quelques semaines, les décisions favorables à la reconnaissance de l'Etat palestinien se succèdent. Après de nombreux pays d'Amérique latine, c'est désormais en Europe qu'on observe des progrès. 
La Suède a déjà franchi le pas et en Grande-Bretagne, en Irlande et en Espagne, les parlements ont adopté, à d'écrasantes majorités, des résolutions pour inviter leurs gouvernements à en faire de même. Le 2 décembre, le Parlement français s’est prononcé lui aussi en faveur de la reconnaissance.

Ces événements ont lieu alors qu'en Europe et dans le monde, des associations, partis et organisations des droits de l'homme font pression contre les entreprises implantées dans les Territoires palestiniens occupés. De même, les députés européens réclament des sanctions contre les biens produits dans les colonies israéliennes de Cisjordanie.


Tout cela est important. Il reste, néanmoins de l'ordre symbolique. Un vote au Parlement n'oblige pas les gouvernements à effectivement reconnaître l'Etat palestinien. Mais il illustre le changement substantiel qui s'est produit dans les milieux politiques et l'opinion publique au niveau mondial, et plus particulièrement en Occident.

Cette tendance ne va pas s'inverser, surtout si le gouvernement de Benyamin Nétanyahou - qui comporte trois ministres qui sont eux-mêmes des colons - poursuit sa politique de colonisation, de confiscations de terres palestiniennes et de renforcement du blocus contre Gaza et contre les quartiers de Jérusalem-Est.

Dessin de Ruben, Pays-Bas

Le problème est qu'il n'y a pas aujourd'hui de direction palestinienne crédible et efficace pour tirer profit de cette situation et faire avancer le projet de construction d'Etat, ou même pour organiser de la résistance politique et populaire contre l'occupation et la colonisation. L'Autorité palestinienne a perdu de sa combativité depuis des années, quant au [mouvement islamiste] Hamas, il se cramponne à son pouvoir à Gaza, tandis que l'Organisation pour la libération de la Palestine (OLP) est devenue coquille vide.

Les louables efforts des diplomates et les interventions des intellectuels palestiniens ou pro palestiniens ne suffisent pas à compenser l'absence de dynamique politique. Bref, au moment précis où les longues années de lutte commencent enfin à porter leur fruit, personne ne semble être là pour le cueillir.

Pour une nouvelle génération

Les Palestiniens ne sortiront de ce paradoxe qu'en permettant l'émergence d'une nouvelle génération de dirigeants. Il faudra des pressions populaires sur le Fatah et le Hamas. Il faudra également tourner la page des dissensions et retrouver un projet national commun, un projet qu'il ne faudra pas sacrifier au nom du "réalisme", ni mettre en péril par aventurisme. Car les conditions internationales sont plus favorables [à la cause palestinienne] qu'elles n'ont jamais été depuis des décennies.
 Ziad Majed

Article traduit de l’Arabe, et paru dans le Courrier International sous un (autre) titre qui est le choix de la revue.